«Une partie de la solution, pas du problème»

• 21 avril 2022
• Électromobilité
• Électromobilité

Rami Syväri, l’électromobilité se développe de manière fulgurante. Quel impact a-t-elle sur l’infrastructure?

En ce qui concerne le nombre d’immatriculations de voitures électriques, nous observons effectivement une courbe de croissance quasi exponentielle: nous sommes donc déjà en plein dans la voie du tout électrique. Parallèlement, des signaux clairs indiquent que le trafic de livraison, le secteur du transport de charges lourdes et même des segments de l’aéronautique s’orientent également dans cette direction. Ces derniers avec des taxis volants électriques à décollage et atterrissage verticaux, pour ne citer qu’un exemple. Pour que tous ces projets puissent être mis en pratique, de futures normes telles que «Megawatt Charging» sont en préparation. On parle déjà de puissances de charge allant jusqu’à 3750 kW, c’est-à-dire 3,75 MW, par point de recharge.

Cela suppose d’énormes pics de demande. Qu’est-ce que cela signifie pour le réseau et la consommation?

Si le parc de voitures de tourisme en Suisse est entièrement électrique, la consommation supplémentaire d’électricité devrait être de l’ordre de 15 à 20%. On pourrait penser que c’est une quantité folle. La quantité d’électricité en soi n’est toutefois pas le point essentiel. En revanche, la puissance nécessaire et le moment de la consommation seront pertinents à l’avenir. C’est pourquoi, ce qui se passe en parallèle dans le domaine de l’efficacité est si important. L’essentiel sera de savoir comment l’électricité arrivera à l’avenir sur le lieu de consommation: à partir de sources centralisées ou décentralisées, ou d’une combinaison des deux.

En principe, trois sources d’électricité sont disponibles pour l’infrastructure de recharge d’un bâtiment: raccordement au réseau, électricité produite sur place et stockage stationnaire ou mobile sur batterie. Quel est leur niveau d’importance?

Les trois sont d’une importance capitale pour l’avenir. La discipline reine consistera à gérer et à coordonner ces sources de manière numérique, dynamique et optimisée en matière de coûts. Quand est-il préférable d’acheter de l’électricité sur le réseau et quand vaut-il la peine de la réinjecter dans le réseau? Quel est le meilleur moment pour charger de l’électricité dans la batterie d’un bâtiment ou d’un véhicule? En Suisse, le modèle RCP (Regroupement dans le cadre de la consommation propre) est un outil qui permet précisément d’atteindre ces optimisations à l’échelle d’un site.

Le soir, la charge électrique des logements et des voitures électriques à recharger est particulièrement élevée: quel est le degré de criticité de ce scénario?

Au niveau de l’immobilier, la recharge de nombreuses voitures électriques dans les parkings souterrains représente pour l’instant un certain défi, que nous pouvons toutefois relever très efficacement grâce au Smart Charging, et ce jusqu’à la future recharge bidirectionnelle, où le parc automobile servira même de groupe électrogène de secours pour l’immobilier. Ainsi, au lieu d’être un problème, un véhicule électrique devient en fait une partie de la solution au sein du système global.

Mais ce n’est pas encore pour demain, n’est-ce pas?

Oui, nous n’en sommes qu’au début, tant pour les stations de recharge que pour les voitures électriques pouvant fournir de l’électricité. Chez Energie 360°, nous suivons l’évolution de près. Il faudra encore attendre un peu avant que des garages complets puissent être équipés de terminaux électriques bidirectionnels. Le gros avantage: chaque batterie de véhicule aura à l’avenir une importance à valeur ajoutée pour le système énergétique. C’est la différence fondamentale avec les véhicules fonctionnant exclusivement aux énergies fossiles.

Quelle sera l’importance du véhicule rechargeable comme stockage intermédiaire d’électricité?

Lorsque toutes les voitures de tourisme de Suisse seront électriques, nous estimons que le potentiel de l’électricité qui y est stockée sera équivalent à une journée complète de production d’électricité en Suisse. C’est donc considérable. Surtout si cette électricité sert à équilibrer et à augmenter l’efficacité de l’ensemble du système. Pour clarifier encore les choses d’une autre manière: la batterie d’une seule voiture électrique moderne permet d’alimenter en électricité un ménage suisse typique pendant une semaine. Mais nous devrons encore attendre deux générations de stations de recharge. De plus, seuls quelques rares modèles de véhicules sont déjà conçus pour des flux de charge bidirectionnels.